lundi 11 janvier 2010

Dernières jurisprudences en droit des contrats administratifs

Je voudrais souligner ici deux jurisprudences importantes touchant le droit des contrats administratifs, et plus exactement leur formation.

La première, le Conseil d'État décide par un arrêt d'assemblée (formation la plus solennelle de la haute assemblée) en date du 28 décembre dernier que

Considérant, en premier lieu, que les parties à un contrat administratif peuvent saisir le juge d'un recours de plein contentieux contestant la validité du contrat qui les lie ; qu'il appartient alors au juge, lorsqu'il constate l'existence d'irrégularités, d'en apprécier l'importance et les conséquences, après avoir vérifié que les irrégularités dont se prévalent les parties sont de celles qu'elles peuvent, eu égard à l'exigence de loyauté des relations contractuelles, invoquer devant lui ; qu'il lui revient, après avoir pris en considération la nature de l'illégalité commise et en tenant compte de l'objectif de stabilité des relations contractuelles, soit de décider que la poursuite de l'exécution du contrat est possible, éventuellement sous réserve de mesures de régularisation prises par la personne publique ou convenues entre les parties, soit de prononcer, le cas échéant avec un effet différé, après avoir vérifié que sa décision ne portera pas une atteinte excessive à l'intérêt général, la résiliation du contrat ou, en raison seulement d'une irrégularité invoquée par une partie ou relevée d'office par lui, tenant au caractère illicite du contenu du contrat ou à un vice d'une particulière gravité relatif notamment aux conditions dans lesquelles les parties ont donné leur consentement, son annulation ;

Considérant, en second lieu, que, lorsque les parties soumettent au juge un litige relatif à l'exécution du contrat qui les lie, il incombe en principe à celui-ci, eu égard à l' exigence de loyauté des relations contractuelles, de faire application du contrat ; que, toutefois, dans le cas seulement où il constate une irrégularité invoquée par une partie ou relevée d'office par lui, tenant au caractère illicite du contenu du contrat ou à un vice d'une particulière gravité relatif notamment aux conditions dans lesquelles les parties ont donné leur consentement, il doit écarter le contrat et ne peut régler le litige sur le terrain contractuel ;


En l'espèce, le Conseil d'État n'hésite pas à remettre en cause la solution retenue en 1996 par sa formation consultative à propos des conséquences à tirer par la signature d'un contrat avant la date à laquelle la délibération autorisant l'autorité territoriale à le signer n'a été rendu exécutoire par sa transmission au contrôle de légalité. On peut comprendre le soucis du Conseil d'État de faire prévaloir le soucis de loyauté dans les relations contractuelles et leur stabilité , c'est à dire la sécurité juridique et la force obligatoire des contrats, mais il faut reconnaître qu'il s'affranchit quelque peu de la lettre du code général des collectivités territoriales. Néanmoins, ce louable soucis se paye d'un accroissement de...l'insécurité juridique. Car il sera de plus en plus difficile à l'administration et à ses partenaires de déterminer avec certitude quel type d'irrégularité pourra entraîner la nullité du contrat.

Le défaut d'information des candidats à une DSP sur les critères de choix peut elle entraîner la nullité du contrat par exemple ? Ce n'est pas à cette question qu'a répondu le Conseil d'État par un autre arrêt du 23 décembre. Il s'agissait en effet d'un référé précontractuel introduit par un candidat malheureux à une délégation de service public avant donc que la convention ne soit signée (puisque le juge des référés précontractuel se déclare incompétent quand la convention est signée). Dans cette espèce, le Conseil d'État étend les obligations de transparence qui pèse sur les collectivités délégante, donnant plein effet principes généraux du droit de la commande publique que sont le liberté d'accès à la commande publique, l'égalité de traitement des candidats et la transparence des procédures. Ainsi, il contribue au rapprochement des régimes des marchés publics et des délégations de service public et fait croire que l'évolution de sa jurisprudence ne doit rien au droit communautaire, malgré l'évidence :

Considérant, en deuxième lieu, que les délégations de service public sont soumises aux principes de liberté d'accès à la commande publique, d'égalité de traitement des candidats et de transparence des procédures, qui sont des principes généraux du droit de la commande publique ; que, pour assurer le respect de ces principes, la personne publique doit apporter aux candidats à l'attribution d'une délégation de service public, avant le dépôt de leurs offres, une information sur les critères de sélection des offres ; que la circonstance que les dispositions de l'article 38 de la loi du 29 janvier 1993 relative à la prévention de la corruption et à la transparence de la vie économique et des procédures publiques prévoient seulement que, après avoir dressé la liste des candidats admis à présenter une offre, la collectivité publique adresse à chacun des candidats un document définissant les caractéristiques quantitatives et qualitatives des prestations ainsi que, s'il y a lieu, les conditions de tarification du service rendu à l'usager , est sans incidence sur l'obligation d'informer également ces candidats des critères de sélection de leurs offres ; que, toutefois, les dispositions de l'article 38 de la loi du 29 janvier 1993 prévoyant que la personne publique négocie librement les offres avant de choisir, au terme de cette négociation, le délégataire, elle n'est pas tenue d'informer les candidats des modalités de mise en œuvre de ces critères ; qu'elle choisit le délégataire, après négociation, au regard d'une appréciation globale des critères, sans être contrainte par des modalités de mise en œuvre préalablement déterminées ; que ces règles s'imposent à l'ensemble des délégations de service public, qu'elles entrent ou non dans le champ du droit communautaire ; qu'ainsi, le juge des référés ayant qualifié la convention litigieuse de délégation de service public, il n'a pas commis d'erreur de droit en annulant la procédure de passation au motif que l'absence d'information des candidats sur les critères de sélection des offres, avant le dépôt de celles-ci, était constitutif d'un manquement aux règles de publicité et de mise en concurrence ;

mardi 5 janvier 2010

La résiliation de la fourniture de 50 millions de doses de vaccin

Si nous en croyons Le Monde.fr dans cet article, le gouvernement s'apprêterait à résilier 50 millions de doses de vaccin sur les 94 millions qu'il a commandé aux laboratoires pharmaceutiques. Le calibrage des commandes avaient été effectué sur la base d'une vaste campagne de vaccination de la population avec possibilité d'injection de deux doses par personnes vaccinées. Le virus de la grippe H1N1 s'avérant pour le moment moins virulent que prévu, les autorités françaises se retrouvent avec des doses de vaccin dépassant largement les besoin, créant d'ailleurs un début de polémique. Cette résiliation partielle de la commande initiale génèrerait une économie de plus de 350 millions d'Euros. Pas négligeable en soit, mais une goutte d'eau dans l'accumulation préoccupante des déficits publics. En effet, selon L'INSEE, la dette publique brute s’établit à 1 457,4 Mds€ (lire l'article sur le site de l'institut, ainsi que celui de Laurent Mauduit, dans Médiapart).

"Ces commandes n'avaient été ni livrées ni payées, elles sont donc résiliées", selon Mme Bachelot. Mais tout cela est un peu cavalier et ne répond pas aux exigences juridiques car les cocontractants de l'administration ont tout de même des droits à faire valoir. la réalité risque donc d'être différente de celle qu'affirme la ministre. Mais quelles sont le possibilités de résiliation à la disposition des pouvoirs publics. En droit administratif, qui concerne les administrations dans les relations avec les particuliers, personnes physiques et personnes morales, il en existe 3. Écartons d'emblée l'hypothèse de la résiliation pour faute. Aucune faute contractuelle ne peut être reprochée aux laboratoires dans la livraison des doses de vaccin ou dans les vaccins eux-mêmes. Restent donc les hypothèses de la résiliation unilatérale et de la résiliation amiable.

La résiliation unilatérale constitue une prérogative de puissance publique à la disposition de l'administration dans tout contrat administratif. Même si elle n'y est pas expressément habilitée dans le contrat qui la lie avec son cocontractant, l'administration peut mettre unilatéralement fin au contrat pour tout motif d'intérêt général. En l'espèce, nous somme bien en présence d'un contrat administratif. En effet, la commande de doses de vaccins par l'État pour des motifs de santé publique constitue un marché public de fournitures. Selon l'article 2 du code des marchés publics "les marchés publics sont les contrats conclus à titre onéreux entre les pouvoirs adjudicateurs définis à l'article 2 et des opérateurs économiques publics ou privés, pour répondre à leurs besoins en matière de travaux, de fournitures ou de services". Et l'État est bien entendu un "pouvoir adjudicateur". Enfin, les marchés publics constituent des contrats administratifs par détermination de la loi. Cependant, étant donné qu'aucune faute ne peut être reprochée aux laboratoire, cette résiliation leur ouvre droit en principe à l'indemnisation du préjudice qu'ils pourraient subir de cette résiliation. Dans ce cas, le préjudice est constitué par le bénéfice dont ils seraient privés par cette résiliation ainsi que le coût de la production des vaccins. Cela étant, si la résiliation leur permet de revendre les doses surnuméraires à d'autres pays au même prix, le préjudice serait alors réduit, voire même, inexistant.

Les pouvoirs publics peuvent aussi s'engager dans la voie de la résiliation amiable. Dans ce cas, la résiliation prend la forme d'un avenant au contrat initial, qui réduirait alors la voilure. C'est l'hypothèse la plus favorable pour l'administration, car elle élimine tout risque contentieux du fait de la résiliation elle-même. Toutefois, l'avenant devrait en principe régler le sort d'éventuels préjudices, et de leur indemnisation. Sinon, il s'agirait, pour les laboratoires, d'un abandon de créances. Et selon les cas, les abandons de créances peuvent être qualifiés d'actes anormal de gestion, et taxés comme tels, voire, comme un abus de bien social. Hypothèse peu vraisemblable tout de même, dans la mesure où on peut considérer que les laboratoires, qui ont des liens étroits avec les pouvoirs publics, ont intérêt à consentir des avantages au pouvoir public. L'abandon de créance hypothétique devrait donc pouvoir aisément entrer dans l'objet social des entreprises concernées.

Cependant, en tout état de cause, il paraît tout de même prématuré voir périlleux d'affirmer qu'une économie de 350 millions d'euros va être réalisée du fait de la résiliation d'une partie des commandes de doses de vaccins. D'autant plus que les laboratoires semblent avoir appris cette résiliation en même temps que le public. Ainsi, si l'ont en croit laboratoire britannique GlaxoSmithKline (GSK), il se dit "prêt à rediscuter" avec le gouvernement français le contrat portant sur la livraison de ces 50 millions de doses de vaccin. "Dans le contexte actuel, s'il y avait une demande du gouvernement, nous sommes prêts bien sûr à rediscuter du contrat que nous avons signé ensemble". Et la laboratoire suisse Novartis indiquait pour sa part ne pas être "en phase de renégociations avec la France".

samedi 2 janvier 2010

Responsabilité en matière de police sanitaire

Une entreprise ne peut obtenir, ni sur le fondement de l'illégalité fautive, ni sur celui de la rupture de l'égalité devant les charges publiques, la réparation des dommages commerciaux consécutifs aux mesures de police sanitaire prises par le ministre de l'agriculture en application d'une décision communautaire concernant l'État français, dès lors que ce dernier a compétence liée (CE 12 mai 2004 Société Gillot)

Selon Maryse Demergue, commentatrice de l'arrêt dans l'AJDA (n°27/2004 p 1492)
L'arrêt...montre finalement que le respect du droit communautaire par l'État français revêt tous les aspects d'une cause exonératoire de sa responsabilité et que l'absence de pouvoir discrétionnaire de l'administration dans la mise en application des mesures européennes de sécurité sanitaire, non seulement neutralise la responsabilité pour illégalité fautive, mais stérilise la responsabilité pour rupture de l'égalité devant les charges publiques. Le paravent du droit communautaire autorise alors l'État français à octroyer aux producteurs lésés des réparations gracieuses...qui non seulement ne recouvrent pas l'intégralité des préjudices commerciaux subis, mais encore ne satisfont pas pleinement le besoin d'État de droit.


Solution pas vraiment étonnante, dans la mesure où l'administration n'a aucune marge de manœuvre et qu'elle est obligée de suivre la décision prise par les autorités communautaire et que seule la cour de justice est compétente pour constater l'illégalité de décisions prises par ses autorités. Toutefois, on peut se poser la question de sa cohérence avec l'ordonnance du 29 octobre 2003 aux termes de laquelle le Conseil d'État avait suspendu l'application d'un décret pris en vue de transposer une directive : un requérant a ainsi pu utilement invoquer, par voie d'exception, les vices dont la directive seraient elle-même entachée pour obtenir la suspension du décret en cause...

lundi 7 décembre 2009

L'aide inadaptée à un candidat handicapé entraîne l'annulation d'un concours

Un candidat au concours interne des Inspecteurs de l'action sanitaire et sociale pour l'année 2007 avait indiqué, lors de son inscription, qu'il demandait à bénéficier de bénéficier du tiers temps supplémentaire et de l'assistance d'une tierce personne pour la lecture des documents de l'épreuve de note de synthèse en raison de son handicap. Finalement, la personne chargée de l'aider s'est présentée comme devant l'aider à la rédaction. N'ayant pas été déclaré admissible, le candidat demande au Conseil d'État qu'il annule les délibérations du jury de concours interne des inspecteurs de l'action sanitaire et sociale établissant la liste des candidats respectivement admissibles et admis à ce concours.

Sur le fondement de de l'alinéa 4 de l'article 27-1 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat, qui dispose que
des dérogations aux règles normales de déroulement des concours et des examens sont prévues, afin, notamment, d'adapter la durée et le fractionnement des épreuves aux moyens physiques des candidats ou de leur apporter les aides humaines et techniques nécessaires précisées par eux au moment de leur inscription
, le Conseil d'État accueille la demande d'annulation par un arrêt du 18 novembre 2009.

Il rappelle en effet que
les aides humaines et techniques légalement prévues doivent être adaptées à la nature et à la technicité des épreuves, compte tenu des précisions apportées par les candidats sur les moyens dont ils ont besoin
.

En l'espèce,
il ressort des pièces du dossier que M. A a demandé, au moment de son inscription aux épreuves écrites du concours interne des inspecteurs de l'action sanitaire et sociale, de bénéficier du tiers temps supplémentaire et de l'assistance d'une tierce personne ; qu'il a alors précisé qu'il aurait besoin d'une personne qui procède à la lecture des documents pour l'épreuve de la note de synthèse ; que lors de l'épreuve de la note de synthèse la personne chargée d'aider M. A à la lecture des documents s'est présentée comme devant l'aider à la rédaction ; que si l'aide à la lecture a été finalement apportée au requérant, il n'est pas contesté qu'elle l'a été par une personne n'ayant pas les aptitudes requises pour procéder à la lecture à haute voix du dossier de l'épreuve de note de synthèse dans des conditions répondant aux exigences de ce concours ; qu'il en résulte que l'autorité administrative organisatrice du concours a apporté à M. A une aide humaine non conforme aux exigences requises par les dispositions précitées de la loi du 11 janvier 1984 et a ainsi entaché d'irrégularité les opérations du concours


En revanche, le Conseil d'Etat rejette les autres conclusions du requérant. D'une part, la demande d'indemnité du candidat malheureux n'avait pas été précédée d'une demande susceptible de "lier" le contentieux, c'est à dire de faire naître une décision de rejet, implicite ou explicite pouvant être contestée devant un juge (demande qui peut dorénavant être introduite en cours d'instance). Ensuite, l'annulation des délibérations des jury n'impliquait pas nécessairement que le candidat soit déclaré admis ni même admissible au concours interne des inspecteurs de l'action sanitaire et sociale.

Sur la base de la jurisprudence Lugan, qui interdit que ne soit remises en cause les nominations de candidats déclarés admis qui n'ont pas été contestées dans le délais de recours contentieux (deux mois après la date de nomination), il rappelle que la décision d'annulation des délibérations de jury de concours la présente décision implique seulement que le ministre du travail, des relations sociales et des solidarités permette à M. A de se présenter à une nouvelle session de ce concours

lundi 30 novembre 2009

Sanction pénale et sanction disciplinaire

Considérant que, lorsque les faits commis par un agent public donnent lieu à la fois à une action pénale et à des poursuites disciplinaires, l'administration peut se prononcer sur l'action disciplinaire sans attendre l'issue de la procédure pénale ; que si elle décide néanmoins de différer sa décision en matière disciplinaire jusqu'à ce que le juge pénal ait statué, il lui incombe, dans le choix de la sanction qu'elle retient, de tenir compte non seulement de la nature et de la gravité des faits répréhensibles mais aussi de la situation d'ensemble de l'agent en cause, à la date à laquelle la sanction est prononcée, compte tenu, le cas échéant, des éléments recueillis, des expertises ordonnées et des constatations faites par le juge pénal


Dans l'arrêt rapporté du Conseil d'État en date du 27 juillet 2009, le juge annule une sanction disciplinaire infligée à une professeur certifié d'éducation musicale et de chant choral. Ce professeur avait été reconnu coupable par jugement définitif du délit d'atteinte sexuelle commis en 1998 sur une mineure de quinze ans, sans violence, contrainte, menace ou surprise. L'administration lui avait infligé la sanction d'exclusion temporaire des fonctions pour une durée de 1 an.

Le conseil d'Etat prenant en compte le caractère strictement privé des faits, l'absence de tout antécédent et sa façon de servir, annule la sanction comme étant manifestement disproportionnée :

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que si les faits reprochés à Mlle A sont de nature à justifier une sanction disciplinaire, ils ont été commis en dehors de tout cadre professionnel, à l'étranger durant les vacances scolaires d'été, à l'occasion d'une invitation de caractère privé ; que ces faits isolés ont été reconnus par l'intéressée et ont fait l'objet de sa part, durant la procédure pénale, de mesures et d'engagements de nature à éviter toute réitération ; qu'à la suite des expertises diligentées, le juge pénal a estimé qu'une reprise effective de ses fonctions par l'enseignante pouvait être autorisée ; que, dès lors, eu égard à la manière de servir de l'intéressée, aux résultats qu'elle a obtenus dans l'exercice de ses fonctions et à sa situation, telle qu'elle se présentait dans son ensemble à la date de la décision contestée, la sanction retenue par le ministre est manifestement disproportionnée ;

Illégalité d'une sanction pour incompétence de son auteur

Les sanctions disciplinaires doivent être infligées par des personnes ayant compétence pour cela. Un fonctionnaire ne peut infliger de sanction disciplinaire à un de ses collègues que s'il bénéficie régulièrement d'une délégation pour cela. Cette délégation pour être opposable, doit avoir été régulièrement publiée. Il s'agit en effet d'un acte règlementaire

Dans un arrêt du 5 février 2009, l'agent qui avait été sanctionné d'un blâme contestait la compétence de l'agent sanctionneur. Pour lui, la simple publication sur le site intranet de France Télécom ne suffisait pas.

La cour administrative d'appel de Nantes lui donne raison par un raisonnement intéressant. Rien n'interdit qu'un acte règlementaire soit publié sur un site intranet, à condition toutefois qu'un acte règlementaire traditionnellement publié en ait fixé les modalités :

Considérant qu'aucun principe général non plus qu'aucune règle ne s'oppose à ce que la publication d'une décision réglementaire régissant la situation des personnels auxquels s'appliquent les dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat prenne la forme d'une mise en ligne de cette décision sur l'Intranet ; que, toutefois, ce mode de publicité n'est susceptible de faire regarder comme régulièrement publiée une délégation de signature qu'à la condition, d'une part, que l'information ainsi diffusée puisse être regardée, compte tenu notamment de sa durée, comme suffisante et, d'autre part, que le mode de publicité par voie électronique et les effets juridiques qui lui sont attachés aient été précisés par un acte règlementaire ayant lui-même été régulièrement publié ;


Considérant qu'en réponse au moyen tiré de l'incompétence du directeur de l'UICB pour prendre la sanction contestée, France Télécom a justifié de l'existence d'une délégation de signature au profit de l'auteur de ladite décision ; que, toutefois, si la délégation de signature en cause a été mise en ligne sur l'Intranet de France Télécom le 7 juin 2005, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'une décision prévoyant la publication par voie électronique des décisions régissant la situation des personnels de France Télécom ait été publiée dans les conditions prévues par l'article 8 du décret du 27 décembre 1996 ; que, dans ces conditions, France Télécom n'ayant pas justifié de l'existence d'une délégation de signature régulièrement publiée, il s'ensuit que la décision contestée était entachée d'incompétence et devait être annulée ;

dimanche 15 novembre 2009

Les limites des pouvoirs du maire en zone inondable

Dans un arrêt du 21 octobre 2009 Commune de Collias, le Conseil d’Etat, visant les articles L 2212-2 et L 2212-4 du CGCT et L 561-1 du code de l’environnement, juge que
« le maire de Collias pouvait demander au préfet d'engager la procédure d'expropriation prévue par l'article L. 561-1 du code de l'environnement s'il estimait que les conditions en étaient réunies ; que le maire pouvait également, en vertu des pouvoirs de police générale qu'il tient des dispositions précitées des articles L. 2212-2 et L. 2212-4 du code général des collectivités territoriales, prendre des mesures temporaires ou limitées de prévention ou de sauvegarde ; qu'en revanche, il ne lui appartenait pas, sur le fondement de ces mêmes dispositions, de prendre une mesure permanente et définitive privant la propriétaire actuelle de l'usage de son bien en interdisant toute occupation de l'immeuble dans l'attente d'une éventuelle acquisition amiable par la commune »


Il s’agissait en l’espèce d’un ancien Moulin transformé en immeuble d’habitation soumis à de forts risques d’inondation, les constructions nouvelles étant interdites au titre du plan d’exposition aux risques d’inondation.

Cette jurisprudence confirme le caractère exceptionnel des pouvoirs de police du maire dont les mesures ne peuvent revêtir un caractère général et absolu. Un maire ne peut donc pas interdire de façon permanente toute occupation d’un immeuble, même soumis à de graves risques d’inondation…