mardi 9 février 2010

Un nouveau cas d'accident de trajet

Par un arrêt en date du 29 janvier 2010, Mme O n°314148 (Dalloz actualités 03/02/2010) le Conseil d’Etat a rajouté une nouvelle catégorie aux accidents de trajet. Un accident de trajet est lié au service, dès lors qu’il survient durant le trajet direct domicile travail, mais aussi lors d’un détour lié aux nécessités de la vie courante (ce qui n’est pas le cas, à mon sens, du détour lié au dépôt de son enfant à une école). A cela s’ajoute l’accident survenu à un fonctionnaire qui s’est involontairement écarté de son trajet domicile travail.

En l’espèce, il s’agissait d’un agent hospitalier qui, rentrant chez lui, a été victime d’un accident mortel dans une gare située après celle où il aurait du descendre habituellement pour changer de train. Le Conseil d’Etat suppose qu’il s’était assoupi.

La haute Juridiction censure la raisonnement tenu par les juges du fond :
« Considérant que, pour décider que l’accident à l’origine du décès de M O ne revêtait pas le caractère d’un accident de service, le tribunal administratif a relevé que la gare de Laigneville, située sur la ligne de chemin de fer en direction d’Amiens après celle de Creil où l’intéressé changeait habituellement de train pour en prendre un autre en direction de Compiègne, jusqu’à la gare de Villiers-Saint-Paul, commune où il résidait, se trouvait en dehors de l’itinéraire normal de la victime, alors que, comme le soutenait (sa femme) M O se serait endormi dans le train et réveillé à Laigneville, n’était lié ni en relation avec les nécessités de la vie courante, ni en relation avec l’exercice des fonctions de M O ; qu’en se déterminant ainsi, sans rechercher si l’écart de trajet effectué par M O avait, comme il était soutenu, un caractère involontaire, le tribunal a entaché sa décision d’une erreur de droit. »

Après avoir annulé le jugement, le Conseil d’Etat tranche directement le litige opposant la caisse des dépôts et consignation à la veuve du fonctionnaire :
« Considérant que…l’accident est survenu sur la ligne de chemin de fer qu’empruntait habituellement M O pour se rendre de son travail à son domicile, dans une gare située juste après celle où il devait prendre une correspondance ; qu’il résulte de l’instruction que cet écart par rapport au trajet habituel de l’intéressé est dû à l’assoupissement de ce dernier et ne traduit aucune intention de sa part de ne pas rejoindre directement son domicile dans un délai habituel ; qu’ainsi, et alors même que l’accident serait imputable à une faute de l’intéressé, M O doit être regardé comme n’ayant pas quitté son itinéraire normal ; que l’accident dont il a été victime a, par suite, le caractère d’un accident de service »

En conséquence, la décision de la caisse des dépôts et consignation est annulé et la veuve de l’intéressé avait bien droit à la réversion de la rente d’invalidité de son mari.

Cette jurisprudence doit être approuvée. La solution inverse retenue par le tribunal administratif était à notre sens trop sévère, s’agissant d’un cas où la victime de l’accident s’était éloignée de son trajet de façon involontaire. On remarquera que pour se faire, le juge n’hésite pas à utiliser une fiction juridique M O « doit être regardé comme ne s’étant pas quitté son itinéraire normal ». Ainsi, les considérations d’équité ne sont pas toujours étrangères aux décisions que prend le Conseil d’Etat. On remarquera que la porte ouverte par le juge à un nouveau cas d’accident de trajet imputable au service n’entraînera pas de dérive engendrant un nombre très importants de nouveaux accidents de trajet. On ne voit d’ailleurs guère que les transports en commun qui seraient en cause, et encore, faut-il, bien entendu, que l’agent ait emprunté son trajet habituel. Enfin, on remarquera que la caisse des dépôts et consignations n’est pas admise à invoquer la faute de la victime. Autrement dit, la faute de la victime est sans incidence sur la qualification d’accident de trajet…

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